De nouvelles études se penchent sur les dispositifs à tabac chauffé et cherchant des réponses sur leurs effets

Les produits alternatifs à la cigarette classique qui fonctionnent à base de tabac chauffé sans combustion sont actuellement très populaires dans l’Union Européenne. Actuellement, ils font l’objet d’une étude aux États-Unis. Plusieurs chercheurs se penchent aussi sur les effets de l’utilisation de ces produits. Iles les comparent non seulement à la cigarette classique mais aussi aux produits désignés comme cigarettes électroniques.

Ces produits sont parfois promus de la même manière que les cigarettes électroniques en tant qu’alternative moins dangereuse au tabagisme traditionnel. Mais les experts en santé publique craignent qu’ils pourraient cacher des dangers similaires. Ils indiquent notamment que ce type de produits pourraient constituer la prochaine étape importante pour l’industrie du tabac.

En raison de leur nouveauté, il existe peu de recherches scientifiques sur ces dispositifs. Cela vaut en particulier sur leur sécurité pour les consommateurs et sur leur utilité pour arrêter de fumer. La revue Healthline a récemment partagé les résultats d’une nouvelle étude qui porte sur le sujet. Elle a été publiée dans la revue ERJ Open Research et elle est réalisée par une équipe de chercheurs, Sukhwinder Singh Sohal, Mathew Suji Eapen, Vegi G.M. Naidu et Pawan Sharma. Dans les lignes qui suivent, nous en partageons avec vous une partie des résultats.

Une nouvelle étude sur les alternatives à la cigarette classique à base de tabac chauffé

L’étude a été publiée tout récemment dans la revue ERJ Open Research. Elle a examiné les effets de la vapeur produite par les dispositifs IQOS. Comme on le sait, IQOS est le nom de la marque d’un produit qui fonctionne à base de tabac chauffé créé par Philip Morris International. Ce dernier est des plus grands fabricants américains de tabac. L’étude s’est intéressée aux effets de la vapeur sur des cellules humaines dans les poumons et dans les voies respiratoires.

Le principe de l’étude

Pour réaliser cette nouvelle étude, les chercheurs ont exposé les cellules épithéliales bronchiques et les cellules musculaires lisses des voies respiratoires humaines à la vapeur IQOS. Ils ont comparé directement leurs observations aux effets de la fumée de cigarette et de la vapeur de la cigarette électronique.

Tous les trois types de fumée se sont révélés toxiques pour les cellules pulmonaires. Selon l’étude, les vapeurs du dispositif IQOS ont présenté une toxicité comparable à celle du tabagisme traditionnel.

« Nous avons observé différents niveaux de toxicité cellulaire avec toutes les formes d’exposition dans les cellules pulmonaires humaines. Il est clairement ressorti que les nouveaux produits n’étaient en aucun cas moins toxiques pour les cellules que les cigarettes conventionnelles ou la vapotage de cigarettes électroniques ». C’est qu’a affirmé Sukhwinder Sohal. Ce dernier est un des auteurs de l’étude et chercheur en sciences de la santé chez à l’Université de Tasmanie.

L’étude conclut que les dispositifs IQOS, comme les cigarettes et les cigarettes électroniques, peuvent entraîner une inflammation. Les chercheurs ajoutent qu’ils peuvent entraîner aussi un stress oxydatif et d’autres effets délétères sur les poumons et sur les voies respiratoires. À long terme, cela peut entraîner de graves problèmes de santé chez les fumeurs. Parmi eux, il y a notamment les risque du développement de la maladie pulmonaire obstructive chronique et du cancer du poumon.

Selon les auteurs de l’étude, celle-ci est une première étape importante dans la compréhension du danger potentiel des produits du tabac de ce type.

Les dispositifs à base de tabac chauffé fonctionnent avec du tabac contrairement aux cigarettes électroniques

Les produits comme IQOS ne fonctionnent pas par combustion. Ils sont la plus nouvelle forme du tabagisme électronique. Mais contrairement aux cigarettes électroniques et aux vaporisateurs, ces nouveaux dispositifs n’utilisent pas de liquide infusé à la nicotine. Celui-ci est connus comme « jus électronique » et il est le produit de base employé par les cigarettes électroniques.

Contrairement à ces dernières, les dispositifs de type IQOS utilisent du vrai tabac. À l’intérieur de l’appareil se trouve un mécanisme de chauffage soigneusement calibré. Il chauffe le tabac à environ 299° C (570° F). Cette température se trouve en dessous de la température de combustion. Mais elle suffit à créer ainsi un aérosol inhalable.

C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles ce genre de dispositif a réussi à s’imposer rapidement sur le marché. Selon les fumeurs qui ont quitté la cigarette classique, les produits qui fonctionnent à base de tabac chauffé présentent une sensation similaire à celle de la cigarette traditionnelle.

Une partie de l’attrait de ces dispositifs réside dans le fait qu’ils sont en mesure d’offrir une sensation distincte de « sensation de gorge » à la sensation physique de fumer des cigarettes. Celle-ci fait parfois défaut dans d’autres vaporisateurs ou dans les modèles de cigarettes électroniques à base de liquide.

Ces produits sont désignés encore par l’anglicisme heat-not-burn (chauffer, ne pas brûler). L’expression est forgée par référence à leur mode de fonctionnement. Celui-ci est présenté comme une alternative à la combustion traditionnelle qui génère la fumée nuisible des cigarettes. Les produits à base tabac chauffé sont déjà vendus au sein de l’Union Européenne.

Ils ne sont pas encore disponibles aux États-Unis. En revanche, ils sont vendus aussi dans d’autres pays de l’Europe et en Asie où sont parfois disponibles depuis 2014. Et partout, ils se sont avérés extrêmement populaires.

Les dispositifs à base de tabac chauffé présentent-ils moins de danger pour la santé ?

John Ayers est vice-chef de de la Division des maladies infectieuses et de la santé publique mondiale de l’Université de San Diego (UC San Diego). Il surveille de près la popularité des dispositifs heat not burn comme IQOS. Pour cela, il utilise des méthodes pratiques comme les recherches sur Google.

Selon lui, « il semble que la communauté de la lutte antitabac soit dans la confusion lorsque les produits du tabac sont renommés ou révisés. C’est ce qui, je le crains, va arriver avec IQOS, comme ce qui s’est passé avec les cigarettes électroniques ».

Ces produits peuvent-ils réduire les dommages ou le risque de maladie ?

Aux États-Unis, les dispositifs IQOS font actuellement l’objet d’un examen par la Food and Drug Administration. C’est l’une des raisons pour lesquelles les chercheurs du pays s’intéressent de près aux effets de ce type de produit.

Devant l’administration américaine, les dispositifs qui fonctionnent à base de tabac chauffé sont examinés en tant que « source fiable de produits de tabac à risque modifié ». Cette dernière désignation sert à indiquer « des produits du tabac vendus ou distribués pour être utilisés dans le but de réduire les dommages ou le risque de maladie liée au tabac associés aux produits du tabac commercialisés ».

Pour obtenir cette désignation, le demandeur doit démontrer que le produit a la capacité de « réduire considérablement les dommages » et les maladies liées au tabac. Par ailleurs, les produits présentés pour examen devraient également bénéficier à la santé globale de la population. Et cela, en tenant compte des personnes qui ne consomment pas de produits du tabac.

Selon Sukhwinder Sohal, les résultats de cette dernière étude indique que l’IQOS ne correspond pas à cette définition.

« Il incombe à l’industrie du tabac de prouver que ses produits les plus récents, comme IQOS, sont potentiellement moins nocifs que les cigarettes », ajoute John Ayers. « Jusque-là, l’environnement réglementaire suppose qu’il s’agit d’un autre produit du tabac ».

Les dispositifs à base de tabac chauffé peuvent-ils aider les fumeurs ?

En raison de la manière dont est présenté le produit devant l’administration américaine, un débat est actuellement en cours. Au centre de celui-ci, la question de savoir si les dispositifs comme IQOS peuvent aider les fumeurs à renoncer à la cigarette.

Le débat est en cours et il se poursuit encore aujourd’hui. Les autorités chargées de l’autorisation du produit demandent au niveau fédéral si les cigarettes électroniques et les vaporisateurs aident réellement les fumeurs à arrêter de fumer. Ou bien, attirent-ils des nouveaux fumeurs, en particulier les plus jeunes.

La réponse la plus probable : en fait, les deux sont peut-être vrais.

Des statistiques récentes ont été publiées par le Center for Disease Control and Prevention. Elles indiquent une augmentation spectaculaire de 1,5 million de fumeurs de tabac chez les adolescents entre 2017 et 2018. En cause : la popularité des cigarettes électroniques chez les jeunes.

Pour beaucoup de spécialistes, les conclusions de ces statistiques sont que les cigarettes électroniques ont un rôle clair dans l’initiation au tabac chez les jeunes. En revanche, pour eux, il est difficile de cerner le rôle de ce type de produit pour les personnes qui souhaitent arrêter de fumer.

Les nouvelles alternatives à la cigarette peuvent-elles pousser plus de personnes à fumer ?

Si le rôle des nouveaux dispositifs fait débat, c’est parce que les spécialistes ne peuvent pas affirmer avec certitude si ces dispositifs incitent plus de personnes à fumer. Mais les experts en santé publique affirment que les produits heat not burn ne sont qu’une autre tentative de la part des fabricants de tabac pour inciter davantage de personnes à fumer.

A ce propos, un certain nombre d’organisations s’expriment ; «L’American Lung Association craint à la fois pour la santé des utilisateurs d’IQOS et pour la santé publique générale ». C’est ce qu’affirme Erika Sward, vice-présidente adjointe du National Advocacy de l’American Lung Association.

« De nombreuses questions restent sans réponse sur l’impact réel sur la santé », affirme Sward. «  Cette dernière étude continue de soulever de véritables doutes sur les affirmations de Philip Morris International sur l’impact réel sur la santé. Les poumons sont souvent les canaris de la mine de charbon en ce qui concerne l’impact des produits du tabac sur la santé. Et nous sommes extrêmement préoccupés par les conséquences éventuelles de l’IQOS », a-t-elle ajouté.

Alors que leur popularité ne cesse d’augmenter, les scientifiques sont à la rechercher des réponses

À l’heure actuelle, il n’y a pas assez d’informations sur les produits qui fonctionnent à base de tabac chauffé.

Selon les professionnels, il existe moins de 30 études dans la littérature médicale sur ces dispositifs. Pour cette raison, les spécialistes se tournent aussi vers des données non traditionnelles. Et ils utilisent aussi des informations de recherche Google pour analyser l’intérêt croissant pour ce genre de produit.

« Les [recherches sur Google] sont probablement un indicateur d’intérêt plus fort », a déclaré John Ayers. « Ici, nous observons des personnes qui recherchent des informations sur le produit, essayant potentiellement d’acheter le produit ».

Selon Ayers, l’examen de ce type de données avait déjà permis de prédire la montée des cigarettes électroniques. Les résultats de ses recherches indiquent qu’il y a maintenant environ 6 à 7 millions de recherches Google à ce sujet au Japon, chaque mois. Il y a deux ans, presque personne ne les recherchait en ligne.

« Ce taux de croissance éclipse tout ce que nous avons vu auparavant pour tout autre produit du tabac. Y compris les cigarettes électroniques », a-t-il déclaré.

Pourquoi les nouveaux produits alternatifs à la cigarette classique sont si populaire

L’attrait des nouveaux produits alternatifs à la cigarette avec du tabac chauffé est multiple. Il offre une nouvelle forme de consommation de nicotine qui pourrait intéresser les fumeurs de cigarettes électroniques.

Il offre également une sensation physique distincte de celle des cigarettes électroniques.

Cependant, les conséquences sur la santé des consommateurs de ce type de produits n’est pas encore bien claire.

« Il y a toutes ces questions de santé publique comme : ‘Peut-il s’agir d’un dispositif d’abandon du tabagisme?’ Nous ne le savons pas ». C’est ce qu’affirme Ayers. « Quels sont les inconvénients de ce produit ? Quels sont les inconvénients d’être exposé à sa fumée ? Nous ne le savons pas », a-t-il ajouté.

Les cigarettes électroniques, qui sont déjà sur le marché depuis des années, restent problématiques. Les chercheurs doivent encore se prononcer sur leurs effets globaux sur la santé publique. Des études récentes indiquent que les cigarettes électroniques sont probablement une option plus saine que le tabagisme traditionnel. Mais tous les experts ne sont pas de l’accord sur ces résultats.

Pour ajouter à cela, le rôle des cigarettes électroniques comme moyen pour arrêter de fumer fait encore débat.

Les cigarettes électroniques ont un attrait spécial pour les adolescents. Il en est ainsi en particulier en raison des liquides de vapotage sucrés, aux fruits et aux bonbons reste également particulièrement controversé.