Yayoi Kusama et son œuvre d’art recouverte de miroirs à la fondation Louis Vuitton
Yayoi Kusama : qui est-elle et quelle est son œuvre ? Yayoi Kusama est une artiste contemporaine. Elle est avant-gardiste. Depuis qu’elle est enfant, elle s’intéresse au dessin. En effet, posée sur les champs familiaux, elle passe des heures à dessiner. Mais est-ce pour travailler son talent ou pour fuir les hallucinations dont elle souffre sérieusement ?
Contenu de la page
- 1 Yayoi Kusuma et ses hallucinations qui changent son œuvre à jamais
- 1.1 Yayoi Kusama et l’ambiance familiale désagréable dans laquelle elle grandit et qui la tourne encore plus vers l’échappatoire de l’art
- 1.2 Yayoi Kusama et son art anti-patriarcale, provocateur, égalitaire
- 1.3 Yayoi Kusama : de sa première exposition à Matsumoto à ses créations et succès aux États-Unis
- 1.4 Yayoi Kusama et ses Infinity Net Paintings à la Brata Gallery en 1959
- 1.5 Le manifeste de l’oblitération que Yayoi Kusama lance en 1960, en déclarant : « Ma vie est un pois perdu parmi des milliers d’autres pois »
- 1.6 Son œuvre phare à la fondation Louis Vuitton aujourd’hui jusqu’au 26 août 2019 : Infinity Mirror Room, une œuvre, des pièces à miroirs
- 1.7 Infinity Mirror Room, la continuité d’Infinity Net Paintings
- 1.8 Profondeur, ouverture d’espace et omniprésence du peintre, par le procédé du miroir, avant Yayoi Kusama
- 1.9 Reprise de « Ma vie est un pois perdu parmi des milliers d’autres pois »
- 1.10 Le procédé de placer des miroirs face à face dans l’art en général et notamment dans le 7e art
Yayoi Kusuma et ses hallucinations qui changent son œuvre à jamais
Ses hallucinations sont la cause de l’originalité de son œuvre. Elles influenceront énormément sa vie et son travail. « Tout a commencé par les hallucinations », affirme l’artiste.
Un jour, elle voit la nappe sur la table au motif de fleurs rouges. Puis, son regard porté vers le plafond, elle continue de voire les mêmes fleurs rouges. Tout son univers est désormais rempli de ces fleurs rouges. Sont-ce des taches, des fleurs, des pois ? Une chose est certaine, elles sont omniprésentes. Voilà pourquoi elles le seront aussi dans ses œuvres.
Yayoi Kusama et l’ambiance familiale désagréable dans laquelle elle grandit et qui la tourne encore plus vers l’échappatoire de l’art
Sa mère fait tout pour l’empêcher d’être artiste. Elle s’oppose à ce que Kusama étudie la peinture japonaise traditionnelle. En fait, ses parents s’opposent à ce qu’elle étudie la peinture tout court.
On peut comprendre qu’à cette époque, il était encore rare de voir au Japon une femme faire une carrière dans l’art. Par ailleurs, sa mère, psychologiquement instable à cause du comportement volage du père de Kusama, se permet de traiter mal sa fille. Kusama dit que la seule chose pour laquelle elle vit, c’était son art.
Yayoi Kusama et son art anti-patriarcale, provocateur, égalitaire
Dégoûtée par sa situation, l’art de Kusama commence à prendre l’allure d’une réaction. Faute de toute symbiose familiale et de l’apparition d’une anxiété constante, Kusama n’a rien d’autre à faire que de s’améliorer.
Aussi, à cause de son incompréhension et du dégoût envers l’hiérarchique typique au Japon, qu’elle commence à développer, Kussama étouffe. Ce qui l’étouffe aussi, ce sont les règles et les méthodes de peinture traditionnelle japonaise.
Yayoi Kusama : de sa première exposition à Matsumoto à ses créations et succès aux États-Unis
Elle se tourne alors vers l’art occidental. Autodidacte, elle élargit le spectre de ses activités. Sa technique s’améliore.
En 1952, Kusama organise sa première exposition personnelle dans sa ville natale et celle-ci connaît un succès. L’artiste produira ensuite à Tokyo et dans d’autres villes. Une grosse œuvre de 250 pièces sera présentée à chaque exposition. Grâce au soutien de Georgia O’Keeffe à qui Kusama avait naïvement écrit une lettre, et au sponsor que Kusama avait trouvé, elle part à Seattle. Mais elle veut être à New York. C’est le centre de l’avant-garde artistique.
Yayoi Kusama et ses Infinity Net Paintings à la Brata Gallery en 1959
Après ses Infinity Net Paintings, elle expose des photos, des collages et des installations. Elle le fait avec Cornell, Johns, Klein, Manzoni, Oldenburg et Warhol. Donald Judd l’aide à produire plusieurs expositions. De plus, elle habite dans un studio juste en dessous du sien.
Grâce à ses contacts, à son entourage, aux influences que les avant-gardistes ont sur elle, Kusama s’immerse, à sa façon, dans les mouvements artistiques de l’époque. Elle crée à travers Judd, Rothko, Newman et Warhol.
Le manifeste de l’oblitération que Yayoi Kusama lance en 1960, en déclarant : « Ma vie est un pois perdu parmi des milliers d’autres pois »
C’est à partir de ce moment qu’il ne fait aucun doute que l’artiste est reconnue. Elle fait une transition vers le happening et la performance. En 1964, elle présente One Thousand Boat Show à la galerie Gertrude Stein. C’est une de ces œuvres les plus connues avec Driving Images. Kusama intitulent ses pièces naked performances ou body festivals. Pourquoi ? Parce que les participants y sont nus. Des danseurs se portent volontaires.
Ses performances les plus célèbres sont Self-Obliteration de 1967, Naked Demonstration/Anatomic Explosion à Wall Street en 1968 et Grand Orgy to Awake the Dead at MoMA en 1969. Elle dirige aussi un film en 1967, de 23 minutes, intitulé Kusama’s Self-Obliteration.
Son œuvre phare à la fondation Louis Vuitton aujourd’hui jusqu’au 26 août 2019 : Infinity Mirror Room, une œuvre, des pièces à miroirs
La petite pièce à miroirs devant laquelle les visiteurs se ruent présente un parterre de champignons hallucinogènes à pois rouges proliférant diaboliquement en se perdant à l’infini. À travers des yeux de l’artiste, à une différence près, on mire les pois rouges partout. Exactement comme Kusama qui, toute sa vie, les voit partout.
Au moment où quiconque pose ses yeux sur l’installation, il les voit sur les murs reluisants. Par le jeu de reflets, la petite pièce dont les murs sont tapissés de miroirs, le permet. Ce que Kusama n’y voit pas, à la différence de l’observateur, c’est son propre reflet, que l’observateur est obligé de voir.
Infinity Mirror Room, la continuité d’Infinity Net Paintings
Ses Infinity Net Paintings ont été présentés pour la première fois à la Brata Gallery en 1959. Phalli’s Field, sa toute petite Infinity Mirror Room, a été créée en 1965. La régression à l’infini que Yayoi Kusama utilise dans son œuvre d’art n’est pas inconnue à l’art de la peinture et à l’art en général. L’interpicturalité « qui incorpore des éléments aux œuvres des maîtres de l’art occidental et qui, par son essence même, est ouverte à toutes les cultures, tous les horizons, tous les métissages », comme le dit Roberto Gac, n’est pas non plus inconnu à l’art et à la littérature (intertextualité).
Profondeur, ouverture d’espace et omniprésence du peintre, par le procédé du miroir, avant Yayoi Kusama
En effet, dans les Ménines de Velásquez, un miroir à l’arrière-plan réfléchit les images de la reine et du roi que le peintre représenté par Velásquez dans le tableau lui-même, peint. Le peintre qui peint, représenté dans le tableau, c’est Velásquez lui-même. Par le jeu de miroir le couple royal semble être placé à l’endroit où l’observateur se placerait pour voir celle-ci.
Mais aussi, dans Les Époux Arnolfini de Jan Van Eyck, on a le détail du miroir où le couple est reflété de dos avec deux autres personnages.
Dans les deux tableaux mentionnés, via le procédé du miroir, on parle de profondeur progressive, d’ouverture d’un espace jusqu’alors inaccessible et de l’omniprésence du peintre. On ne parle pas encore de régression à l’infini mais c’est un début.
Reprise de « Ma vie est un pois perdu parmi des milliers d’autres pois »
En dehors de l’art, les miroirs dans la galerie des Glaces à Versailles reflètent la perspective des jardins et magnifient encore le pouvoir du Roi Soleil. C’est une première dans l’habillage d’un intérieur en vue de la provocation de sensations narcissiques inédites, pas tout à fait la même chose donc à voir avec l’intention de Kusama.
Elle ne cherche à photographier que son effacement perpétuel par la représentation prolifique de pois dans l’univers éternel composé de tels “moi”.
Le procédé de placer des miroirs face à face dans l’art en général et notamment dans le 7e art
Le dessinateur Winsor McCay en 1908 utilise la formation d’images fuyantes à l’aide de la mise des miroirs face à face. Dans l’industrie cinématographique, le premier à utiliser le procédé, c’est Charles Chaplin dans Le Cirque. Beaucoup plus tard, en 1947, une scène culte dans Opération Dragon, de Robert Clouse, Bruce Lee se livre dans pratique d’arts martiaux dans une salle tapissée de plusieurs milliers de miroirs.